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MÉTAUX ET PLANÈTES

le symbole de la planète Mercure et celui du métal ne sont pas encore les mêmes, malgré le rapprochement établi entre eux ; le métal étant toujours exprimé par un croissant retourné. Le mercure et l’étain ont donc chacun deux signes différents dans nos listes, suivant les époques.

La copie de la liste planétaire donnée par Albumasar (ixe siècle) et traduite en hébreu et en grec dans le manuscrit 2419 (fol.  46 verso) porte aussi la trace de ces changements (texte grec, I, viii, p. 24, notes). Non seulement le signe de la planète Hermès répond à l’émeraude, le nom de Mercure étant ajouté après coup et tout à fait à la fin, comme il a été dit plus haut ; mais l’auteur indique que les Persans affectent l’étain à la planète Hermès. De même, la planète Jupiter étant suivie de l’étain, l’auteur ajoute également que les Persans ne font pas la même affectation, mais assignent cette planète au métal argenté[1] ; ce qui se rapporte évidemment à l’asèm ou électrum, dont l’existence était déjà méconnue au ixe siècle. Ce sont là des souvenirs des attributions primitives.

Voilà les signes planétaires des métaux fondamentaux, signes qui se retrouvent dans ceux des corps qui en dérivent ; chacun des dérivés étant représenté par un double signe, dont l’un est celui du métal, et l’autre répond au procédé par lequel il a été modifié division mécanique, calcination, alliage, oxydation, etc.).

Les principes généraux de ces nomenclatures ont donc moins changé qu’on ne serait porté à le croire, l’esprit humain procédant suivant des règles et des systèmes de signes qui demeurent à peu près les mêmes dans la suite des temps. Mais il convient d’observer que les analogies fondées sur la nature des choses, c’est-à-dire sur la composition chimique, telle qu’elle est démontrée par la génération réelle des corps et par leurs métamorphoses réalisées dans la nature ou dans les laboratoires ; ces analogies, dis-je, subsistent et demeurent le fondement de nos notations scientifiques ; tandis que les analogies chimiques d’autrefois entre les planètes et les métaux, fondées sur des idées mystiques sans base expérimentale, sont tombées dans un juste discrédit. Cependant leur connaissance conserve encore de l’intérêt pour l’intelligence des vieux textes et pour l’histoire de la science.

  1. Οἱ δὲ Πέρσαι οὐχ οὖτως, ἀλλὰ διάργυρος : Texte grec I, viii, p. 24 (notes).