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Voyage

& quoique le chevalier & la belle Orſelis ne ſongeaſſent guère à nous tous, ils paroiſſoient ſi contens, qu’on avoit envie de ſuivre leur exemple.

Dans de telles diſpoſitions, vous devez juger, madame, que la converſation ne devoit pas languir : il y eut au commencement quelques traits piquans dans la converſation, avec une apparente douceur qui ne permettoit d’y répondre que ſur le méme ton ; mais ſur la fin de la collation, le comte me baiſa la main, en recevant de moi des fraiſes qu’il m’avoit demandées. La marquiſe me dit en riant, que j’étois apparemment comme madame de… dont M. de Buffy dit qu’elle n’avoit jamais refuſé la main, parce qu’elle ne croyoit pas que ce fût une grande faveur. Cette attaque me fit rougir, car je vis bien quelle rouloit ſur ce que je n’ai pas la main belle ; mais, me remettant promptement : il eſt vrai, dis-je en riant auſſi, que ma main ne peut faire grand plaiſir à baiſer ; mais ces converſations ſecrettes que vous avez avec M. le marquis, comment les appellez-vous ? Il faut décider ici, & avouer la faveur, ou renoncer a l’eſprit. Cette repartie embarraſſa fort la marquiſe. Le comte ſaiſit l’occaſion de lancer auſſi ſon trait, & dit que, ſelon toutes les apparences, ma-