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charme et la grâce. Mais dans la région lointaine que je m’efforce de peindre, un changement complet se fait sentir ; la prairie remplace la forêt, la montagne la colline, l’étang le lac, le torrent le fleuve. Grossi quelquefois par les orages, ce dernier sort de son lit, se déchaîne et entraîne tout dans sa course furibonde et dévastatrice. La débâcle fut si forte au mois de mai 1878, que Denver eut tous ses ponts enlevés en une seule nuit ; et pourtant le mince ruisseau qui passe au milieu de la ville est loin d’annoncer de telles colères.

CLIMAT.

Le climat du Colorado est d’un caractère tout particulier ; il est à la fois bizarre et charmant. Les saisons sont peu marquées, les pluies sont rares et la sécheresse qui en résulte est tellement grande que n’était son altitude, le pays serait tout à fait inhabitable. Les neiges presque perpétuelles des régions élevées, une brise constante, et l’irrigation des terres pratiquée sur une grande échelle, font le Colorado non-seulement salubre, mais productif.

Comme la pression de l’air diminue en raison de la hauteur, les personnes attaquées de l’asthme ou de phthisie pulmonaire y recouvrent la santé pourvu qu’elles aient quitté assez tôt un climat devenu fatal ou par ses rigueurs ou par son insalubrité. Malheureusement il arrive presque toujours que les gens se décident à changer de pays après avoir attendu trop longtemps ; aussi il n’y a rien d’étonnant que les localités salubres soient si remplies de pauvres malades se berçant d’un vain espoir de guérison, se cramponnant inutilement à un reste de vie, mourant enfin loin de leur famille et de leurs amis, sous un soleil radieux mais impuissant à arrêter les ravages de la maladie. Ces tristes exemples se répètent non-seulement à Denver, mais partout ailleurs et particulièrement dans certaines villes de France et d’Italie où l’on voit, chose bizarre, le plaisir coudoyer la souffrance, la narguer effrontément et présenter ainsi le contraste le plus pénible.

Pour être incontestablement favorable aux santés débiles, le Colorado ne fait pas pour cela de miracles, et tout bienfaisant que soit le soleil, il n’empêchera jamais qu’une