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variant ainsi l’ordinaire des presbytériens, les presbytériens celui des Baptistes, les Baptistes celui des Wesleyens et tutti quanti réciproquement. Deux sectes seulement vivent en dehors de cette fraternelle promiscuité, ce sont le chaînon du commencement et celui de la fin, les deux extrêmes : épiscopaux et unitariens ; c’est-à-dire le dogme absolu et le dogme indéfini ; l’un, bâti de ce granit dont on fait les tombes solides ; l’autre formé de ces vapeurs qui se dissipent au soleil. Les épiscopaux sont l’Église anglicane, autrefois établie d’autorité dans les colonies d’Amérique, l’ancien catholicisme romain, fait schisme par Henri VIII. L’unitarianisme est le frère jumeau du protestantisme libéral français.

Des unitariens il ne fut nullement question à propos de la chapelle américaine. Fortement soupçonnés de ne pas même croire à la divinité de Jésus, ces gens-là sont rejetés, par toutes les nuances de l’orthodoxie, en dehors de tout paradis. Mais on tenait à s’adjoindre les épiscopaux, riches, nombreux et influents. Par malheur, fidèles, en fiait de concessions, à leur origine, les épiscopaux n’en font pas plus que l’Église romaine. Ce furent donc les presbytériens qui durent accepter le book-common-prayer (livre des prières communes), charte des non-libertés de l’Église anglicane, éditée avec soin par Jacques Ier, roi, comme on sait, très-capable de régler au plus juste les rapports de la terre avec le ciel. Ce livre contient, réunies aux psaumes, les principales prières catholiques, entre autres le Gloria in excelsis et le Credo, où se trouve retranché, après Église, le seul mot romaine. Enfin, le ministre presbytérien dut revêtir un costume assez semblable à celui des diacres, mais noir.

Il ne faudrait pas s’imaginer que toutes ces concessions ne fassent pas très-graves. De longues guerres ont eu lieu, et des nations se sont entre-dévorées à moins. C’était précisément par horreur pour ce costume et ce book-common-prayer que les fondateurs spirituels des États-Unis, les Pères Pèlerins, avaient abandonné leur patrie, souffert mille persécutions et mille traverses et s’étaient voués aux rigueurs de l’exil sur le sol aride et glacé du Massachusetts. Une telle défection de la part de leurs descendants peut donc nous faire mesurer jusqu’à quel point l’esprit de tolérance a, de nos jours, envahi la foi, et cela nous paraît un des signes des temps les plus graves.

En revanche, les épiscopaux montrèrent combien ils étaient au-dessus de pareilles faiblesses. Chez eux, ni les flots de la Manche, ni ceux de l’Océan ne sont parvenus à effacer le baptême primitif des eaux du Tibre, et, seuls dans tout le protestantisme, ils refusent de prêter leurs chaires aux prêtres des autres communions. On leur avait tout accordé ; mais, bientôt, ils rougirent de leur condescendance et s’indignèrent de partager le lieu de leur