était puissant sur elle, et elle s’assit au piano, près du quel Marie et Lionel vinrent se placer.
Sans doute le désir de plaire à ses deux jeunes amis, peut-être celui d’humilier miss Edgermond, l’animèrent ; elle se sentit si inspirée, qu’elle réveilla même lady Edgermond et força Lucy à l’écouter ; miss Edgermond seule bâillait, frappait à faux la mesure, et finit enfin par fermer les yeux.
« Quoi ! vous dormez, Anabelle ? dit lord Edgermond, qui était entré doucement ; je m’en étonne, car miss Delmar a vraiment un fort beau talent ; je crois qu’on m’a dit qu’elle possédait aussi une belle voix. »
Lionel posa sur le pupitre plusieurs romances : Amélie les chanta avec un goût exquis.
« Quel est l’artiste qui vous a montré ? demanda lord Edgermond.
— Garat, milord.
— Votre père vous destinait sans doute au théâtre ? » prononça-t-il froidement.
Ces paroles dédaigneuses, la manière dont il avait dit : Votre père, ce père qui était son frère, brisèrent l’âme d’Amélie ; elle quitta le piano.
« Nous avons bien assez de musique, s’écria miss Edgermond avec ennui.
— Aussi demanderai-je la permission de me retirer, prononça Amélie avec fermeté, et à milord celle de