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le monde, où je n’aime que vous, je vous laisse une partie de cette fortune que je donnerais en entier pour une heure de votre attachement ; vous ne pourrez la remettre à personne, car c’est un secret que je confie à votre foi. Ne la dédaignez pas pour en faire des heureux. »

Je fus touchée de cette lettre ; il y régnait une tristesse qui en excusait l’inconvenance. D’ailleurs, M. de Morange était parti ; cette idée de ne plus le revoir rendit ma mélancolie encore plus profonde. Et puis, quelle est la femme qui ne soit touchée des sentimens qu’elle inspire, bien qu’elle ne veuille pas y répondre ?

Cependant je ne voulus point conserver le contrat de rentes que m’envoyait M. de Morange, et je fus le déposer chez un notaire à son adresse.

Après cet événement, qui m’avait un moment peut-être distraite de ma profonde douleur, je restai de nouveau tristement abandonnée, et mes yeux ne se fermèrent plus qu’au milieu des larmes. Je repoussai toute idée consolante ; mais si je descendais dans mon cœur, du moins, je n’y trouvais pas une pensée coupable : j’aimais Charles plus que je ne l’avais jamais aimé, et pourtant son injustice commençait à me blesser profondément. Que fut-ce donc quand le domestique qu’avait emmené M. de Bermon vint chercher ce qui était