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était parti avec sa cousine et mon fils ! J’appris qu’il s’était rendu chez sa tante, mon ancienne institutrice, qui, depuis deux ans, était retirée à la campagne.

Partir ainsi, m’enlever mon fils, oser emmener avec lui cette femme que je haïssais ! cette conduite porta mon indignation et mon ressentiment à son comble, et pour la première fois j’osai méconnaître le noble caractère de Charles ; j’osai me dire qu’il ne me traitait si mal que parce que je n’avais ni parens ni fortune ; je rougis de lui tout devoir : jusque là j’en étais fière. Cette pensée donna à mes larmes une inexprimable amertume ; je songeai à ma jeunesse, qui me présentait de si longues années à souffrir, et je passai plusieurs jours dans un état d’irritation que je ne puis me rappeler sans frémir.

Ce fut alors qu’un paquet de papiers me fut remis ; une lettre signée de Morange, qui ne contenait que peu de mots, excita à la fois ma curiosité et mon étonnement :


« Quand vous recevrez cette lettre, madame, écrivait-il, je serai bien loin d’ici ; je pars pour l’étranger, car je suis coupable de vains et insensés projets en vous voyant, et malheureux en ne vous voyant pas. Je vais exposer mon inutile vie pour ajouter à une fortune qui ne peut rien pour mon bonheur. Presque seul dans