Page:Collectif - Le livre rose - 4.pdf/371

Cette page n’a pas encore été corrigée

je me sentis mieux : la fierté l’emportait sur la tendresse.

D’ailleurs, je venais de passer deux mois dans une solitude absolue, et la société eut pour moi tout le charme de la nouveauté. À cette réunion, une femme célèbre par sa beauté et son esprit parla d’orphelins restés sans ressource ; on proposa une quête pour ces infortunés : chacun déposa son offrande, que l’amour-propre et la vanité rendirent considérable : mais celle de M. de Morange surpassa toutes les autres ; car, après avoir jeté dans la bourse tout l’or qu’il portait sur lui, il y ajouta un diamant de grand prix, dont j’avais plusieurs fois admiré la beauté, et dit à voix basse, avec une grâce et une sensibilité dont je ne l’aurais pas cru capable : « Je suis trop heureux aujourd’hui pour ne pas contribuer au bonheur des autres. »

Mais en rentrant chez moi, je retrouvai mes douleurs et mes inquiétudes. J’avais été un peu distraite par le bruit et les flatteries qui avaient bourdonné autour de moi ; je songeais alors à ce que penserait M. de Bermon. J’appris qu’il m’avait demandée, qu’il avait paru éprouver une triste surprise en apprenant que j’étais allée au bal ; j’eus l’imprudence de me réjouir de sa tristesse, je me flattai que le lendemain il chercherait une explication, et je m’endormis en rêvant une réconciliation pleine et entière. Mon réveil fut affreux : M. de Bermon