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couverte de voitures. J’entendis un cri sortir de l’une d’elles, et, rappelant mon fils, je me hâtai de fuir la vue de ce monde qui m’était insupportable ; mais je fus bientôt atteinte par deux personnes qui m’avaient suivie. C’étaient M. de Morange et sa cousine. M. de Morange n’avait plus cette expression de joie qui lui était habituelle ; pâle et réellement abattu, il baissait les yeux devant moi, comme embarrassé d’un état qu’il comprenait à peine lui-même. Il gagnait à ce changement ; sa voix était moins bruyante, ses manières plus distinguées.

« Eh quoi ! madame de Bermon, s’écria sa parente, c’est au hasard que je dois le plaisir de vous rencontrer ! Je me suis présentée dix fois chez vous, et je devrais vous en vouloir ; mais je sais que ce n’est pas votre faute : M. de Bermon est jaloux, ou plutôt il feint de l’être pour cacher ses torts envers vous ; car personne n’ignore les soins qu’il rend… »

J’arrêtai madame de V… ; elle s’excusa sur son amitié, sur l’indignation que la conduite de M. de Bermon causait à toute notre société.

Je dois l’avouer, je ne crus pas un mot de ce qu’elle me disait ; j’avais trop de respect pour le caractère de Charles, je me croyais encore trop certaine de son amour, pour croire un instant qu’il pût être infidèle ; mais je lui en voulus mortellement de me donner l’air d’une femme trahie.