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Ainsi s’était détruit le bonheur d’une union si douce et si sacrée ; je n’avais plus devant moi cette longue vie d’amour que j’avais cru devoir me conduire jusqu’à la tombe ; mon fils même n’était plus pour moi qu’une consolation insuffisante ; j’en voulais même à cet enfant de conserver la joie de son âge tandis que j’étais triste et souffrante. Bien souvent cependant nous fûmes au moment de nous rapprocher, Charles et moi ; mais au travers de mille qualités qui brillaient en lui, on pouvait lui reprocher une fermeté qui allait jusqu’à une extrême sévérité. Il crut que j’avais mérité une forte leçon ; il crut que l’honneur lui ordonnait de ne pas céder. Moi, je crus ma tendresse méconnue, et je n’écoutai que mon orgueil.

Un jour cependant, cédant aux prières de mon fils, je consentis à sortir avec lui. Je choisis le côté le plus solitaire du bois de Boulogne : je marchais les yeux baissés vers la terre : je me rappelais le temps, qui n’était pas encore loin, où, heureuse et gaie, je parcourais ces allées appuyée sur le bras de Charles.

« Quoi ! nous étions-nous écriés souvent, il y a déjà six ans que nous nous aimons ! » Et nous rappelant notre première entrevue, nous bénissions le sort et l’amour. À ce souvenir, mes yeux pleins de larmes ne reconnaissent plus le sentier que je voulais suivre ; et je me trouvai dans la grande allée, qui ce jour-là était