Page:Collectif - Le livre rose - 4.pdf/365

Cette page n’a pas encore été corrigée

votre orgueil. J’ai éloigné Louise pour qu’elle ne fût point témoin de vos torts. Vous avez le droit de ne pas la chercher si elle vous déplaît ; mais, je vous le répète, je vous défends de voir M. de Morange. »

Demeurée seule, mes larmes, retenues par la fierté, coulèrent en abondance ; cependant je ne pensai pas un instant à enfreindre des ordres que je trouvais injustes, mais qui m’inspiraient une profonde terreur ; car pour la première fois je venais d’entendre parler en maître celui qui m’avait accoutumée à une entière abnégation de lui-même, et je pris pour de l’indifférence et de la dureté ce qui n’était qu’une noble dignité. Mon imagination, qu’on n’avait jamais dirigée, m’emportait toujours au-delà des bornes.

J’accusai Charles de ne plus m’aimer ; à la moindre contrariété, je doutai de lui ; un ressentiment assez vif se mêla à ma douleur, et si je me décidai à lui obéir, ce fut avec une dignité froide qui devait le blesser. Ma santé avait souffert de tout ce qui venait de se passer ; sous ce prétexte, je m’enfermai chez moi, je fis défendre ma porte, et reçus dédaigneusement les soins de Charles ; enfin, par une extrême contradiction, j’attachai un prix extrême aux sociétés que M. de Bermon m’avait interdites ; je les avais trouvées souvent insipides, je me persuadai maintenant que je ne pourrais rencontrer aucun plaisir ailleurs.