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Nous offrîmes toutes nos modestes présens ; après on se mit à table : alors je levai les yeux, et le beau regard de Charles rencontra le mien ; mais ensuite, par une convention tacite, les yeux de l’un se fixaient sur l’autre quand ils croyaient ne pas être aperçus ; nous semblions nous laisser ainsi le plaisir de nous examiner, comme si nos tristes regards ne devaient jamais se con fondre. Comme elle passa rapidement cette soirée qui devait laisser une si forte trace dans mon souvenir !

On fit de la musique ; Charles, dont sa tante m’avait si souvent vanté le talent, refusa d’y faire sa partie ; mais moi, il me fallut accompagner mes élèves et chanter ; à peine put-on m’entendre. Charles enfin se leva, dit adieu à tout le monde, et s’inclina seulement devant moi. Il partait au point du jour. Je m’enfuis dans ma chambre.

« Eh bien ! me dis-je, en essayant de calmer mon désespoir, eh bien ! je ne le reverrai plus ; mais je l’aimerai toujours, mais jamais ma main ne s’unira à celle d’un autre ; je vivrai de souvenir. Hélas ! souvent après quelques années, le bonheur ne se compose que de cela.

Au bout de quelques mois, madame Darcy tomba malade ; son état réclamait les soins les plus assidus ; nous nous relayions pour ne jamais la laisser entre des mains mercenaires, et c’était plus souvent mon tour