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tous les malheurs. Hélas ! je n’ai point trompé ma destinée....

Enfin, l’année fixée par ma tante allait finir.

J’achevais, un matin, un paysage que je destinais à orner le salon de ma tante, quand on m’appela chez madame Darcy, notre maîtresse de pension. Je saute de joie ; c’est ma tante sans doute : déjà mes bras s’ouvrent pour l’embrasser ; mais je recule effrayée à la vue d’un homme d’une figure froide et étrangère. Mon imagination, qui va toujours au-devant de la peine, devine un malheur, et je prononce en tremblant le nom de ma tante.

« Elle n’est plus, me répond impassiblement cet homme, elle est morte en sortant d’un bal. »

Je tombe sur un siége, les larmes m’étouffent : je me représente ma tante si jeune, si belle encore, toujours si riante, maintenant insensible ; morte ! elle qui semblait si pleine d’existence, qui marchait dans la vie avec tant de sécurité. Je l’ai devant les yeux, j’entends son dernier adieu, je vois son dernier sourire. Pendant ce temps, on me parle d’argent, de succession, de mon oncle que je connais à peine. Cet homme s’en va ; quand il est parti, madame Darcy veut me consoler, me rendre du courage, et je finis par comprendre que la mort de ma tante m’enlève tout, que mon grand-père a donné sa fortune à des enfans qu’il a eu de sa gouver-