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près vous serez mistriss Nellys. Vous êtes riche, Edouard aussi ; vous êtes charmante, Edouard n’est pas moins favorisé de la nature ; toutes les prospérités semblent devoir être votre partage, et pourtant je tremble…

— Et de quoi ! bon Dieu ! cher grand-papa ? s’écria Henriette ; mon bonheur ne sera-t-il donc point parfait, puisque nous serons deux à vous soigner ? Fut-il jamais, d’ailleurs, un cœur plus noble, une âme plus généreuse que celle d’Edouard ? Ah ! si tant de qualités réunies ne vous rassurent pas sur mon sort, mon père, c’est que votre tendresse pour votre Henriette vous rend trop difficile à satisfaire. Je serai heureuse, j’en suis certaine, s’il ne faut qu’aimer avec tout l’abandon, toute la bonne foi d’un cœur que vous avez formé.

— Eh bien ! tout cela n’est point assez, mon enfant, reprit l’amiral ; et ce qu’il vous manque à tous les deux, c’est, à toi, ma fille, un caractère moins confiant, moins expansif, moins léger, en un mot ; ce qu’il faut à sir Nellys, c’est plus d’indulgence, moins de penchant à accorder une influence excessive aux exigences, aux préjugés du monde. Tu ne vois point tout cela, mon enfant, parce que tu es sous le charme de la plus belle illusion de la jeunesse ; parce que tu crois que l’amour est éternel, et qu’avec lui on ne peut jamais souffrir ; mais le moment n’arrivera que trop tôt où l’amant de viendra un maître, et l’époux un juge qui te demandera