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ne serait peut-être pas à elle qu’il le devrait ; bientôt une autre femme allait vivre dans son intimité, elle lui enlèverait peut-être cet hommage naïf et pur dont sa vanité était si touchée. Hortense ne put supporter cette pensée ; ses regards devinrent moins sévères, mais Ernest restait profondément rêveur.

« Est-ce donc à l’uniforme que vous venez de quitter que vous donnez des regrets, M. de Sernan, dit Hortense, ou celui que vous venez de revêtir annonce-t-il à vos amis que vous allez les quitter ?

« — Je ne pense guère à mon avenir, madame, répondit Ernest ; il est si difficile d’être heureux.

« — La difficulté vient peut-être de vous-même, » prononça Hortense d’une voix douce.

Elle s’attendait que les regards d’Ernest allaient lui répondre que son bonheur ne dépendait que d’elle ; mais il reprit avec découragement :

« — Quand on aurait devant soi une perspective assurée de bonheur, n’est-il pas affreux de voir le malheur d’une autre sans y pouvoir remédier ? Cette jeune Emma, par exemple, votre amie, madame, est-il donc vrai qu’il n’y a point de remède à sa maladie ? »

Madame de Servière mordit ses lèvres avec violence pour comprimer sa colère, mais elle ne put s’empêcher de dire avec ironie :

« M. de Servière aime à mettre du tragique dans