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Depuis l’instant où madame de Servière avait offert l’hospitalité à Emma, sa vie avait pris un intérêt qui l’empêchait de ressentir encore le vide qui l’avait ramenée aux souvenirs de sa première enfance. Sans doute elle n’aimait pas, mais elle se croyait aimée ; elle savait qu’il y avait un être qui écoutait avec ivresse toutes les paroles qui sortaient de ses lèvres ; elle croyait enfin qu’Ernest la trouvait ce qu’il y avait de plus adorable au monde ; sa vanité était satisfaite, son esprit était occupé, c’était assez pour qu’elle regrettât de s’être donné un obstacle, un témoin gênant ; elle se lassait déjà de cette amitié de femme dont elle n’apercevait plus que la charge. Depuis qu’elle avait revu Emma, elle s’avouait enfin, car on ne peut toujours dissimuler avec soi-même, que si elle l’avait sue aussi élégante, aussi aimable, elle ne l’eût point attirée chez elle. Long-temps elle chercha le sommeil, et long-temps l’image gracieuse de madame de Verneuil vint rembrunir ses rêves ; elle la retrouva au réveil, et son désappointement, son humeur, la sui virent dans la première visite qu’elle lui rendit. Emma était plus souffrante, plus abattue que la veille : le mouvement du voyage endort ordinairement les douleurs, mais quand l’instant du repos est arrivé elles reprennent plus fortement.

« — Ma chère Emma, dit madame de Servière avec