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un seul instant fixer son attention ; alors il s’avoua avec terreur l’impression que madame de Servière avait faite sur lui. Et cependant il allait la voir à toute heure ; dans tout le danger de l’intimité comment cacherait-il le trouble que faisait naître en lui la passion coupable qui, en si peu de temps, venait de bouleverser sa raison ? Cette femme qui l’avait enchanté, enivré, cette femme était celle de son tuteur, de son ami oh ! c’était un crime affreux, que cette admiration, qu’il n’osait pourtant appeler de l’amour. À ces pensées il cacha sa tête dans ses mains, il essaya de chasser ce brûlant souvenir de femme, mais il était toujours là, et le pauvre Ernest se prit à pleurer de remords.

Tout semblait fait aussi pour exalter sa jeune imagination : cet appartement parfumé lui semblait d’autant plus joli, qu’il se persuadait que madame de Servière avait présidé à son arrangement ; cette charmante bibliothèque où il ne se trouvait que des poésies tendres, des romans, tout cela avait été choisi par une femme ! Ernest en dévora plusieurs. Au point du jour, sa bougie s’éteignit ; il se jeta alors sur son lit, où il trouva un sommeil cent fois plus fou, plus délirant que sa veille même.

Cependant il fallait reparaître devant celle qui, depuis quelques heures, occupait toutes ses pensées.