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fonde mélancolie dont elle était atteinte. Une autre cause vint encore rendre cette tristesse plus profonde ; elle avait perdu deux enfans, « deux anges au ciel, écrivait-elle à son amie ; ah ! si tu les avais connus, ils étaient si beaux ! tu aurais partagé mon espérance en les voyant prospérer jusqu’à près d’un an. Mais à cette époque je les ai perdus, perdus tous deux ; je n’ai pu en sauver un, et pendant l’absence de Charles je n’ai rien qui me console. Son père me gronde de ma tristesse, et moi je sens que cette «tristesse est le pressentiment de quelque malheur. »

Ce malheur arriva ; Charles de Verneuil mourut de la fièvre jaune, à la Havane. Quand cette nouvelle parvint à sa famille, la santé de madame de Verneuil était déjà fort altérée, on crut qu’elle succomberait ; mais le ciel voulut qu’elle se relevât pour pleurer son époux sur les cendres de ses deux enfans. Cependant elle ne se remettait point de sa langueur ; ces secousses si terribles, ces étreintes maternelles l’avaient si fortement ébranlée, que son beau-père, craignant qu’elle ne succombât, exigea qu’elle vint à Paris pour y consulter les plus célèbres médecins.

Tous ces détails parvinrent à madame de Servière au moment où, fatiguée du vide de son âme, elle cherchait à se rattacher à une affection quelconque. Aussi s’empressa-t-elle d’offrir sa maison à madame