Page:Collectif - Lausanne à travers les âges, 1906.djvu/44

Cette page a été validée par deux contributeurs.
 Les corrections sont expliquées en page de discussion
40
LAUSANNE À TRAVERS LES ÂGES

Le tournoi se termina par le triomphe des réformateurs. Ferrand Loys, l’opposant laïque, et quelques prêtres passèrent à la Réforme. Cet exemple fut suivi par plusieurs personnes. Les zélateurs de la nouvelle foi brisèrent les autels, les images et les crucifix de la cathédrale, croyant donner par là la mesure de leurs récentes convictions.

Le 24 décembre 1536, LL. EE. promulguèrent un Édit de Réforme. Les sacrements furent réduits à deux, les images supprimées, ainsi que la messe, les pélerinages et toutes les cérémonies de l’ancien culte. Les ecclésiastiques furent autorisés à se marier ; le jeu et la danse prohibés ; le nombre des jours fériés réduit.

Une partie des biens d’Église fut affectée à l’entretien des pasteurs, des maîtres d’école et des indigents, ainsi qu’à des pensions en faveur des ecclésiastiques, chanoines et prêtres titulaires de prébendes. Une autre partie importante servit à faire des largesses aux communes. La petite « Largition », du 1er novembre 1536, et la grande Largition du 18 avril 1548, diminuèrent les répugnances que les Lausannois avaient pour le nouveau régime. L’administration communale, pauvre sous les évêques, vit sa position notablement améliorée par l’abandon que les Bernois lui firent des belles forêts de Sauvabelin et du Jorat, ainsi que des biens du prieuré de Saint-Sulpice, des couvents de Sainte-Catherine et de Bellevaux et du monastère de Montheron, avec des vignes du Dézaley d’En-Bas[1]. LL. EE. ne s’oublièrent pas dans cette répartition : elles gardèrent pour elles une importante partie des domaines de l’Église et emportèrent à Berne le magnifique trésor de la cathédrale, qui se composait de statues en or et en argent, de châsses, de reliquaires, de crucifix, ciboires, calices, encensoirs, manteaux, chandeliers, lampes, bassins, pierres précieuses, étoffes, tapis, broderies, missels et manuscrits d’une valeur incalculable[2]. Pour se faire une idée de l’importance de ces richesses, il faut se souvenir qu’avant la Réforme, le clergé possédait à peu près le tiers de la propriété immobilière du pays. On a évalué le revenu de l’évêque à soixante mille écus d’or et celui de chacun des chanoines à quatre mille.


IX

Fondation de l’Académie. — Organisation des pouvoirs publics.


Une académie fut fondée à Lausanne en 1537 en vue de former des pasteurs. En 1540, un collège y fut adjoint. D’écoles populaires il n’était pas question alors : un siècle encore devait s’écouler avant qu’elles fussent organisées d’une manière générale et régulière, et encore quelles écoles[3] ! Viret, Conrad Gessner,

  1. Le Dézaley d’enhaut dépendait du couvent de Haut-Crêt ; il fut acquis par la ville en 1803.
  2. Voir les mémoires de M. Ernest Chavannes sur le trésor de la Cathédrale (Lausanne, 1863), et, sur le même sujet, celui de M. J. Stammler, publié en 1902 dans les Mémoires et documents de la Société d’histoire de la Suisse romande, série II, tome V.
  3. Voir A. Gindroz, Histoire de l’instruction publique dans le pays de Vaud, Lausanne, Georges Bridel, 1863.