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MŒURS LAUSANNOISES SOUS LES ÉVÊQUES

villes de Berne et de Fribourg firent don à la ville de Lausanne des beaux vitraux, attribués au peintre Hans Funck (1470-1529)[1], qui ornent aujourd’hui encore la salle de la municipalité de Lausanne, et font l’admiration des archéologues ; ils représentent les armes de Berne, de Fribourg et de Lausanne avec l’aigle à deux têtes ; ils montrent que la qualité de ville impériale était reconnue à Lausanne par ses alliées. L’évêque voulut protester contre cette alliance, mais un arbitrage confié aux villes de Berne et de Soleure donna raison aux bourgeois (1533).

Si les lettres des empereurs Sigismond et Frédéric III peuvent laisser subsister des doutes sur la prétention de la ville de Lausanne à être considérée comme cité impériale[2], ces doutes tombent en présence des termes de la lettre adressée, le 5 juillet 1536, par Charles-Quint, aux Lausannois pour les adjurer de demeurer fidèles à la foi catholique. Voici cette lettre, dans la traduction qu’a bien voulu nous en faire M. le professeur André Kohler.


Aux honorables, nos chers et fidèles sujets du Saint-Empire, les bourgmestre, conseillers et communauté de notre ville impériale de Lausanne, à tous et un chacun.

Charles, par la grâce divine empereur des Romains, Auguste, etc.

Honorables, fidèles et chers sujets,

Nous avons appris que dans cette ( votre) cité que nous nommons nôtre et impériale, où parmi les autres édifices ecclésiastiques, il existe une église cathédrale dotée par nos prédécesseurs et placée sous notre protection, il se fait des innovations à l’égard de la religion et de notre foi et qu’entre autres on a ordonné une certaine dispute qui doit se faire bientôt là sur le même objet. Toutes ces choses nous sont d’autant plus odieuses que nous voyons qu’elles sont entreprises à l’encontre de nos édits impériaux par lesquels nous avons voulu que toutes innovations cessassent et fussent suspendues jusqu’au futur concile déjà décrété par nos soins et par notre intercession auprès de la béatitude du Souverain Pontife et devant commencer au prochain mois de mai. Conséquemment nous vous requérons sérieusement et vous ordonnons d’empêcher la dite dispute ordonnée (comme il est dit plus haut) et toutes les autres innovations relatives à notre foi et à notre religion, — les annulant sur le champ, de rétablir tout ce qui a été changé dans son état premier, et de remettre la cause au futur concile qui doit avoir lieu (comme il est dit plus haut), sans vous permettre de faire le contraire en quelque manière que ce soit et sans permettre qu’on le fasse, enfin nous vous ordonnons de vous comporter de telle sorte (litt. : de vous montrer si obéissants), que nous soyons entièrement persuadés de votre respect pour nous et de votre soumission au Saint-Empire. Donné à Savigliano[3], le cinquième jour de juillet de l’an du Seigneur MDXXXVI, le XVIe de notre règne[4].

CAROLUS.
Par ordre exprès de sa majesté impériale et catholique,
Obernburger.
  1. Voir l’article consacré à Hans Funck par M. Paul Ganz dans le Dictionnaire des artistes suisses (éd. Huber & Cie, Frauenfeld, 1905).
  2. Dans La Germania topo-chrono-stemmato-graphica sacra et profana du R. P. F. Gabrielis Bucelini, publié en 1655 à Augsbourg, Typis Johanis Grætorii, nous voyons figurer Lausanne au nombre des civitates liberæ imperiales et provinciales, qua et immediate imperatorem salvis cateris juribus recognoscebant et partim ad huc recognoscunt: exscriptæ ex matriculis et actis imperialibus.
  3. Les mots en italique ont été ajoutés par le traducteur. La ville de Savigliano est en Piémont, province de Coni.
  4. Dans les Manuaux, on voit que la lettre de Charles-Quint a été enregistrée au Conseil de Lausanne à la date du 18 juillet 1536, en ces termes : Fuit mandata per Karolum imperatorem Lausanam una littera qui fuit lecta