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— LE LIVRE DES FEMMES. —

chance, et si elle tourne mal, il faut savoir nous replier sur nous-mêmes et nous consoler avant que le temps nous ait appris que notre douleur est un ridicule. »

Restée seule, je cherchai à me calmer ; je ne me laissai point aller à ces accès de désespoir qui usent et la raison et les forces. Je voulus voir ma position froidement, et je dus m’avouer que j’avais manqué de dignité et de respect pour moi-même en revoyant M. de Seignelay après l’inconvenante confidence qu’il m’avait faite. Je me dis que j’étais moins tendre que vaniteuse ; que j’avais pardonné son infidélité et que je n’avais pu oublier la découverte qu’il avait faite sur mon visage. Je me dis enfin que c’était là ma plaie cachée, et je pleurai beaucoup ; d’ailleurs je n’étais pas femme à demi. Les délices d’une passion qui m’avait rendue si heureuse, il fallait y renoncer ; ces liens si forts, il fallait les briser ; il le fallait, car,