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— LA PREMIÈRE RIDE. —

autant de simplicité que je lui aurais offert la fleur qui reposait sur mon cœur. Il fit une dangereuse maladie, et sans écouter les représentations de ma famille, ni la crainte de me perdre de réputation, je m’assis nuit et jour près du lit où il souffrait, et je ne pris ni repos ni nourriture tant qu’il fut en danger ; et lui… il me sut très-mal, il conduisit sa nouvelle conquête au bal, et quand ma pauvre mère, tremblant de me perdre, lui écrivit pour le conjurer de venir me rendre un peu de courage, il ne répondit pas et je sus qu’il riait de mes regrets, comme d’une douleur passagère. J’ai long-temps pleuré à ce souvenir, mais l’indignation l’a emporté : après l’avoir tant aimé, je ne suis plus que son juge, et je l’ai flétri du nom d’ingrat. »

Mathilde avait parlé avec feu, mais son émotion fut passagère : elle redevint calme et me dit très-sérieusement :