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— LE LIVRE DES FEMMES. —

nous rejette dans la vie réelle, et la vie réelle n’a point de doux ni de nobles souvenirs. Ne nous abusons pas, enfin : ce n’est point pour ce que nous aimons que nous faisons des sacrifices à l’amour, et on n’obtient rien de ce sentiment par la reconnaissance et la pitié. J’en étais trop convaincue, Arthur m’oublierait bientôt ; et si je le poursuivais de mes plaintes, de mon désespoir, il se féliciterait d’être échappé à une femme vaporeuse, jalouse, et sa douleur ne me vengerait pas.

Cependant la passion, la jalousie conseillent toujours si mal que je ne pouvais m’arrêter à un parti dont je fusse contente ; et pourtant je ne pouvais demeurer ainsi. Sous le prétexte d’une indisposition, je refusais depuis deux jours de voir M. de Seignelay, je sentais qu’il me fallait rompre avec lui, ou feindre d’ignorer ce que j’avais entendu. Cette dissimulation était difficile avec mon caractère, et je de-