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— LE LIVRE DES FEMMES. —

et semblait ne savoir plus que dire ; il s’amusait avecque rien ; il comptait ses doigt, ou les ondes de mes cheveux, et riait ensuite à la réflexion de son innocence. Mais toujours ses entretiens les plus insignifians en apparence avaient leur caractère et leur charme particuliers. C’était un parfum, une mélodie ; c’était quelque chose d’ineffable et d’infini. Toujours je sentais l’âme profonde et la vaste pensée, et je ne l’approchai jamais en vain.

Son influence sur moi, bien que lente et insensible d’un jour à l’autre, n’en était pas moins sûre et active ; c’était celle de la sève à la plante. Mais ce n’était pas sans souffrances ni déchiremens que ce travail s’opérait en moi. Je m’enfantais moi-même à une autre vie ; il me fallait mourir pour renaître, et comme il ne m’avait pas suffi d’être bercée avec cette maxime évangélique, il venait me la rendre sensible et m’apportait le fer et le feu de l’expiation.