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— LE LIVRE DES FEMMES. —

sur les rives du fleuve qui devait porter ton navire. La voilà qui va cacher sa frayeur dans le silence du désert… et moi, fuyant la tendresse de mon père, où me cacherai-je ? À ma gauche un désert affreux, c’est la mort ; plus près un chakal disputant à un vautour les débris du corps d’un Bédouin, encore la mort ; devant moi des tombeaux, toujours la mort !… Oui, l’Éternel a compté mes jours, il a décidé que, malgré tes vœux et les miens, il ne resterait rien après moi de notre amour… Quelle existence ! souffrir, jeter un faible éclat, souffrir encore, être aimée un instant, s’éteindre comme un pâle flambeau… et bientôt être oubliée… Ô toi qui unissais à l’amour le plus tendre les qualités de l’âme et la volonté du bien ! m’aurais-tu délaissée ? Notre éloignement suffirait-il donc pour ralentir les battemens de ton cœur ?… tandis que ce cœur est mon dieu, mon univers ! Ah !