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— LE LIVRE DES FEMMES. —

« Oui, on sonne à l’église, et c’est cela qui l’effraie. Nous autres pauvres on nous enterre la nuit, entassés pêle-mêle, un seul drap noir pour tous ; mais les riches meurent ainsi que les pauvres. L’enterrement est plus beau, voilà tout. L’égalité revient après, lorsque la même terre recouvre tous les cercueils.

— Et nous serions mieux à trente pieds sous la terre que de rester à gémir et à souffrir ici, répondit la seconde femme.

— La mort ne nous atteint pas lorsque nous la demandons, reprit sa compagne ; il faut attendre que le froid et la misère nous l’apportent dans un grenier. Les hôpitaux sont ouverts aux malades ; il n’y a pas de secours contre la faim ! Viens, dit-elle, viens à la porte de l’église ; allons voir ce bel enterrement, pour nous assurer du moins qu’il y a une justice dans le ciel.

— Tout a été donné aux uns et rien