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riens bons et vertueux, qui habitent au bord d’une mer sombre, hérissée de rochers, toujours battue par les orages. On y connaît à peine le soleil ; les fleurs sont les mousses marines, les algues et les coquillages coloriés qu’on trouve au fond des baies solitaires. Les nuages y paraissent sans couleur, et la joie même y est un peu triste ; mais des fontaines d’eau froide y sortent des rochers, et les yeux des jeunes filles y sont comme ces vertes fontaines où, sur des flots d’herbe ondulée, se mire le ciel…

« Mes pères, aussi loin que nous pouvons remonter, étaient voués aux navigations lointaines, dans des mers que tes Argonautes ne connurent pas. J’entendis, quand j’étais jeune, les chansons des voyages polaires. Je fus bercé au souvenir des glaces flottantes, des mers brumeuses semblables à du lait, des îles peuplées d’oiseaux qui chantent à leurs heures, et qui, prenant leur volée tous ensemble, obscurcissent le ciel… » À ces lignes seules et quand nul autre document ne viendrait corroborer cette première induction, l’observateur reconnaîtrait la marque propre de la poésie celtique, cette imagination toute morale qui projette sur les objets la nuance intérieure des pensées de