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Qui jaillissaient de ses prunelles.
Mais alors deux flèches nouvelles
Volèrent, et le léopard
Tomba percé de part en part.

Nom d’un pétard ! nom d’un pétard !


Ce fut, d’ailleurs, la seule joie de la pièce, ce léopard ; une carpette de 5 fr. 95 au dos d’un canasson étique représentait la dépouille de ce fauve de façon cocassement piteuse, et j’éprouvai un instant, à contempler cette descente de lit pour meublés à vingt sous la passe, la même allégresse que j’avais connue, l’an passé, quand le salé, qui représentait le vautour prométhéen s’était écrié, suintant d’angoisse : « Mamin, pipi ! »

Cette figuration, nombreuse, décharde et ridicule : ces cavaliers, ces mages, ces satrapes, ces immortels (j’en ai compté plus de quarante), ces captifs, ces piqueurs, avec leurs coiffures en forme de tourtes — symbolisme ingénu —, avec leurs robes d’indienne et leurs sarraus blancs qui laissaient passer des pantalons effrangés et des godillots pas cirés, tout ça, c’était sale, et ça tenait de la place ; aggravé de bassets qui jouaient faux et d’instrumentistes qui aboyaient, ça faisait un boucan pas ordinaire.

Entre nous, Aspasie Laparcerichepin, fût-elle sans voiles, m’exciterait plus que le général