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PROMENADE EN HOLLANDE.

grosse servante paraît avec son bonnet blanc aux ailes de dentelle, sa jupe et sa camisole en toile lilas et son inséparable collier en grains de grenats à plaque d’or : c’est une fille à taille courte et forte et à mine réjouie ; elle ne sait pas vingt mots de français ; quand je finis par me faire comprendre, elle pose ses poings sur ses hanches et se prend à rire follement ; ses éclats se mêlent au bruit infernal. L’aspect de cette fille est si grotesque que je me mets à rire à mon tour. Enfin, quand elle peut parler, elle me dit que ce que je prends pour une bête enragée est le nourrisson d’une dame anglaise qu’on cherche à apaiser en le promenant dans le couloir.

« Ne pourrait-on aller plus loin ? répliquai-je.

— Impossible : cette famille a loué à l’avance toutes les chambres du couloir.

— Excepté la mienne, repris-je, et je suis prête à l’abandonner, si vous pouvez m’en donner une autre. »

La servante me fit comprendre que les cris se répandaient dans toute la maison, et en effet ils étaient en ce moment si stridents qu’ils auraient percé les murs d’une citadelle.

J’essayai de me rendormir en plongeant ma tête sous les couvertures, mais les horribles miaulements me poursuivaient par intermittence. Je gagnai la fièvre à ce sommeil impossible, et quand je voulus me lever je sentis que mes tempes battaient avec force. La crainte de tomber malade dans une