Page:Colet - Promenade en Hollande.djvu/175

Cette page a été validée par deux contributeurs.
165
PROMENADE EN HOLLANDE.

Sa femme en tressaillit dans ses entrailles ; elle laissa tomber un beau papillon pourpre qu’elle tenait à la main, et dont les deux ailes se détachèrent.

Cependant les clameurs et les imprécations du bon Van Dolfius redoublaient ; il tournait autour de la vitrine et faisait avec des exclamations entrecoupées l’éloge du coquillage brisé, comme jadis les Grecs de leurs héros morts.

« La Cythérée des mers du Japon, s’écriait-il, un coquillage unique qu’aucune collection du monde ne possédait, une merveille de grâce et de forme ! un joyau plus rare que le Régent ou l’émeraude du roi de Delhi ! »

Puis ses cris, ses plaintes et ses menaces contre le coupable destructeur recommençaient.

La maison en fut remplie ; les domestiques s’effrayèrent et se cachèrent ; l’institutrice dit à Sulpicia :

« Voilà l’orage qui gronde !

— Eh bien ! répliqua l’audacieuse enfant, je l’affronterai seule. »

Et, d’un bond, elle s’élança dans le cabinet et vint se placer en face de son père.

« Parle ! parle ! lui dit celui-ci en secouant son beau bras rose et nu de ses doigts décharnés, quel est le voleur, l’assassin qui s’est introduit ici pour mutiler cette fleur de beauté ? »