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POÈME
À UNE ÂME EN DEUIL.




I

TOURMENTS DU POÈTE.


Après tout, qu’importent les revers, si notre

nom, prononcé dans la postérité, va faire battre un cœur généreux deux mille ans après

notre vie ?
Chateaubriand.
Amour, vertu, génie, tout ce qui a honoré l’homme, l’homme l’a persécuté.
Madame de Staël.


Oh ! ne me parle pas de bonheur et de gloire,
À moi, pauvre ignorée, à qui rien n’a souri !
À moi qui, dans la coupe où j’aurais voulu boire,
      Trouvai le miel tari !

Comme la sensitive aux regards je me cache ;
Mais il ne suffit pas d’être pure et sans tache
      Pour couler d’heureux jours :
Au désert, la pensée ardente, insatiable,
Qui sonde trop la vie, et que la vie accable,
Fermente dans mon âme, et la ronge toujours !