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qui séparaient les rayons de bibliothèque dont les murs étaient couverts. C’était le portrait de ma mère : un grand dessin à la gouache dont les demi-teintes rendaient à merveille la douceur et la distinction des traits. C’était ensuite le portrait de mon grand-père, figure sévère, presque sombre, dont la bouche, large et serrée, avait une expression d’amertume, tandis que les yeux éclatants et le front calme donnaient au haut du visage une extrême sérénité. Cette peinture au dessin pur et sobre de couleurs rappelait la manière de David ; la chevelure, disposée en ailes de pigeons, était poudrée à frimas ; l’habit bleu barbeau, coupe de la République, avait deux vastes revers en pointes, de même que le gilet blanc à la Robespierre ; entre ces revers, se groupait le nœud bouffant de la cravate de mousseline qui s’enroulait en plis profonds autour du cou.

Tout l’ajustement contrastait avec la pâleur et l’expression grave de la tête.

Le troisième portrait, magnifique miniature de Petitot, représentait un chevalier de Malte, mon grand-oncle ; la tête, jeune et superbe, était couverte de la longue et abondante perruque de la fin du règne de Louis XIV, le cou reposait dans une cravate blanche à plis majestueux ; la cuirasse était en bel acier bruni rehaussé d’or et d’émail bleu ; un manteau de pourpre flottait sur l’épaule gauche.

Après avoir regardé attentivement ces trois portraits, Albert feuilleta quelques-uns de mes livres ; il fut frappé par une édition des œuvres de Volney, et par un vo-