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d’entendre le coup de sonnette qui retentit à ma porte ; tout à coup, je sentis une main tirer à mon côté les plis de ma robe ; c’était ma vieille servante qui me disait avec sa grosse mine toujours réjouie :

— Madame, voilà un monsieur !

Je tournai la tête et je me trouvai en face d’Albert de Lincel.

Il était plus pâle que la veille et si essoufflé qu’il semblait défaillir ; je lui pris la main et je l’obligeai à s’asseoir ; il tomba comme anéanti sur un fauteuil.

— Vous voyez, me dit-il, que je n’ai pas tardé à vous rendre votre visite.

— Oh ! que vous êtes bon, répondis-je, d’être venu si vite et d’être monté si haut.

— Il est vrai que c’est un peu haut, marquise, mais c’est bien à vous de ne pas avoir quitté votre hôtel et d’avoir eu le courage de vous y loger sous les toits. Je vois en ceci un présage de bon augure ; un jour vous redeviendrez, comme autrefois, propriétaire de l’hôtel entier.

— Les poëtes sont prophètes, lui dis-je en riant ; ce que vous dites là me portera bonheur et je gagnerai mon procès. En attendant, regardez quelle belle vue ; et je le conduisis vers la fenêtre, puis me retournant vers l’intérieur de mon petit salon, j’ajoutai : J’ai d’ailleurs ici, autour de moi, mes plus chères reliques, et je ne regrette rien de mon grand appartement du premier étage.

Il se mit alors à considérer avec intérêt trois portraits,