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frissonnais pour ainsi dire de son mouvement ; Léonce allait arriver.

— Chez quels rentiers du Marais dînez-vous donc, repartit Albert en riant, pour partir à cinq heures un quart de chez vous ? Ne me quittez pas si tôt et causons un peu, ou je vais m’imaginer que vous me trompez. Est-ce bien vrai, poursuivit-il tendrement que vous vous êtes fait si belle pour de vieux parents ? Non, je veux que ce soit pour moi ; allons, soyez bonne comme vous l’avez été déjà, écrivez pour vous dégager et laissez-moi finir cette journée avec vous. Vous ne vous ennuierez pas, je vous le jure : Amelot m’a fourni de quoi vous divertir ! Dès que nous avons été en wagon, le massif Amelot m’a dit : « Je me sens en verve ; mon esprit monte, il court, il court… — Eh bien ! mon cher, ai-je répliqué, laissez-le courir ; je ne me charge pas de l’attraper. » Et tenez, marquise ; j’ai envie de commencer de suite le récit de nos aventures et de vous tenir enchaînée par la curiosité comme le sultan des Mille et une Nuits. J’ai aussi des vers à vous lire, car j’en ai rêvé pour vous sur le bord de la mer ; et vous, chère, n’avez-vous pas fait pour moi encore un de ces sonnets que vous faites si bien ?

En parlant ainsi, sa main touchait aux papiers qui étaient sur la table ; il aperçut mes strophes sur les Résidences royales et s’en empara.

Je voulus l’empêcher de les lire, mais il les serra fortement dans sa main en s’écriant gaiement :

— Oh ! par exemple, est-ce que l’écolier ose déjà