Je la repoussai.
— Je ne veux pas de sacrifice, je ne veux plus de toi, lui dis-je, en mentant à l’amour, car je l’aimais encore de toute la puissance de mon être.
Elle s’était levée :
— Tu as tort de me parler de la sorte, poursuivit-elle d’une voix caressante ; j’aurai la raison et la tendresse que tu n’as plus. Je comprends maintenant qu’il faut nous séparer et soumettre nos cœurs à la terrible épreuve de l’absence : nous nous retrouverons un jour plus affectueux et moins exigeants.
— Que veux-tu dire, répliquai-je, parle sans phrases ?
— Je crois qu’il est bon que tu partes ; ta famille t’attend ; l’air de la France t’est nécessaire ; nos cœurs se sont aigris l’un l’autre dans un perpétuel contact. Peut-être ce que j’éprouve pour Tiberio n’est qu’une illusion. Quand tu ne seras plus là, peut-être c’est toi que j’aimerai ; alors tu me reverras, non plus troublée et incertaine, mais ravie comme au premier jour où tu m’aimas ; oui, cher Albert, quelque chose me le dit, je te reviendrai, mais laisse-moi mon libre arbitre, quittons-nous pour mieux nous réunir un jour.
Je la laissai parler sans l’interrompre ; dans tout ce qu’elle me disait je sentais le mensonge se heurter contre la vérité.
— Eh bien ! que décides-tu, fit-elle après un assez long silence qui l’embarrassait.
— Je partirai ce soir même.