Elle me répondit qu’elle ne revenait jamais sur une résolution prise ; que la distraire de son travail ce serait l’exposer à l’impossibilité de le finir, et que je savais bien l’impérieuse nécessité qui l’obligeait d’aller vite.
— Imite-moi, me dit-elle, et après nous aurons nos jours de vacance.
— Tu le sais bien, repartis-je, je ne puis travailler que par intervalles ; que deviendrai-je dans cette solitude où tu me laisses souffrir ?
— Es-tu malade ? me dit-elle, en ce cas je ne te quitte pas, je vais me mettre à coudre à ton chevet.
— Je n’ai que faire d’une sœur de charité, répliquai-je irrité.
— Bien ; puisque ce n’est qu’une inquiétude oisive je te dis adieu jusqu’au souper.
Et sans voir mes bras qui se tendaient vers elle, elle s’enferma de nouveau sous clef.
Le déjeuner m’avait ranimé, une heure de sieste acheva de me remettre ; je me levai, et tout en faisant ma toilette avec soin, je fredonnai quelques vers de la barcarolle que je devais porter à la prima donna. J’ouvris ma fenêtre ; le ciel était éclatant et le temps d’une douceur tiède. Nous étions à la fin de novembre, je pensai qu’à la même heure une atmosphère grise et froide enveloppait Paris, et qu’une brume plus noire encore pesait sur Londres. Je me dis que la jeunesse de là-bas avait bien raison d’avoir le spleen, mais que sous le ciel bleu de Venise, c’était une duperie. Secouant