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des enroulements capricieux pleins de grâce ; les cheveux noirs sont nattés en espèces de corbeilles de formes variées, d’où s’échappe le pezzotto ; il descend et se déploie sur les épaules, ondule sur les bras, et forme des plis d’une ampleur et d’une harmonie que la statuaire grecque n’aurait pas dédaignés. Ce voile national est porté par toutes les femmes, sans distinction de rang ni d’âge. Les mères et les jeunes filles, les patriciennes, les bourgeoises et les paysannes, se montrent également sous le pezzotto, la taille dessinée à travers sa blancheur et le visage élancé et libre ; elles le revêtent surtout les jours de fête pour aller à l’église et à la promenade.

Nous fûmes ravis, Antonia et moi, de l’aspect de toutes ces femmes glissant suavement comme des ombres blanches sous les arbres sombres. Nous avions mis pied à terre, et nous parcourions, appuyés sur le bras l’un de l’autre, les beaux ombrages de l’Acquazola. Les marchandes de fleurs passaient en riant et nous jetaient leurs gros bouquets de tubéreuses, de cassies, de roses et d’œillets aux senteurs les plus vives. J’en couvris les genoux d’Antonia. Nous nous étions assis sur un banc abrité près de la pièce d’eau dont les jets rafraîchissants s’élançaient dans l’air. Les plateaux circulaient chargés de sorbets et de fruits confits. La brise de la mer agitait sur nos têtes les branches flexibles. C’était un dimanche : la musique militaire jouait des symphonies où nous retrouvions les airs les plus beaux des grands maîtres italiens. Tout