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vii
préface

mettent du leur, et ces traits ainsi corrompus et défigurés, qui ne sont autre chose que leurs propres pensées et leurs impressions, ils les exposent à la censure. »

C’est encore la Bruyère qui définit de cette façon délicate et profonde les détracteurs d’un livre. Oh ! oui, c’est bien cela ! l’ouvrage, corrompu et défiguré par tout ce qu’ils y mettent du leur, est exposé de la sorte à la censure aveugle du public, sciemment trompé par des critiques fallacieux. Ce sont eux que l’équité devrait condamner comme violateurs et falsificateurs de la pensée, qui, de toutes les propriétés humaines, est la plus sacrée.

Quel était donc mon crime ? On ne pouvait pas m’accuser d’avoir amoindri les puissantes individualités qu’on se plaisait à reconnaître dans mon livre : je leur avais laissé leur grandeur troublée mais réelle, et, par respect, j’avais poétisé et ennobli les personnages secondaires qui leur font cortége. C’est ainsi que j’ai doué d’une beauté irrésistible l’amant d’aventure qui distrait un mo-