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— Remontons en voiture, me dit Albert, quand nous eûmes rejoint l’enfant, et profitons des dernières heures du jour pour parcourir quelques carrefours lointains de la forêt.

Nous fûmes bientôt emportés dans des allées plus sombres, où, en été, quand les grands arbres avaient leurs feuilles, le jour ne devait pas pénétrer ; ces allées s’entre-croisaient sur des escarpements sauvages coupés par des ravins.

— Il faudra que nous venions revoir ces gorges au temps où les ronces et les lianes s’y entrelacent, reprit Albert ; en attendant nous les traverserons de nouveau ce soir, et vous verrez l’étrange effet de ces grands squelettes d’arbres à la clarté de la lune.

La nuit commençait à tomber lorsque nous arrivâmes à la maison d’un garde-chasse qui tenait un cabaret. Nous dînâmes rapidement et gaiement ; Albert but une bouteille de vin et fit boire mon fils, ce qui plongea presque instantanément l’enfant dans un lourd sommeil. Je le déposai dans la voiture sur la banquette de devant et il ne se réveilla qu’à Paris. Jamais plus belle nuit ne s’était levée dans ce ciel parisien si souvent brumeux ; on pouvait compter dans l’éther les constellations ; les milliers d’étoiles de la voie lactée faisaient cortège à une pleine lune d’une limpidité radieuse.

Tandis que les astres nous éclairaient d’en haut, les grandes lanternes de la voiture qu’Albert avait fait