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terre étrangère le pain de l’hospitalité ; il versa des larmes de rage en passant sous la porte blasonnée de son manoir féodal, et ses fils aînés, forcés de contenir leur indignation contre le vainqueur, poussèrent un cri semblable au rugissement de jeunes lionceaux. Leur mère, qui tenait par la main son plus jeune fils, était accablée d’un morne désespoir ; l’enfant comprit tout ce que sa douleur muette avait de profond, et il lui dit d’une voix ferme et pleine de conviction : — Consolez-vous, ma noble mère, nous reviendrons un jour ; nous ne mourrons pas sur la terre d’exil.

La comtesse de la Mîrandole avait un frère, prieur d’un couvent près de Bologne ; elle résolut d’aller lui demander asile pour sa famille. Fra Rinaldo accueillit les exilés avec tous les égards et tout l’empressement dus au malheur : il mit à leur disposition une petite villa dépendante du monastère ; ils y trouvèrent une vie douce et calme.

Mais le comte et ses fils aînés, accoutumés au luxe et au commandement, ne pouvaient se faire à cette existence obscure. Ils se lièrent d’amitié avec plusieurs gentilshommes des environs ; ils allaient chasser sur leurs terres, prenaient parti dans leurs querelles et tâchaient ainsi de gagner leur amitié et de les décider à leur prêter des troupes pour re-