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l’arbre qui grandit sous vos mains, le troupeau qui s’anime, les rochers qui se dressent… Qui vous a appris tout cela ?

FILIPPO. Personne. Est-ce que cela s’apprend ? Depuis que je pense, je reproduis ainsi tout ce que je vois sans savoir comment. Mais ce qui me tourmente, c’est de ne pouvoir donner des couleurs à mon ouvrage, ces belles couleurs de la madone de notre église.

BUONAVITA. Des couleurs ! ah ! si vous en désirez, je puis vous satisfaire. Il y a quelque temps, nous arrêtâmes sur la route de Florence un peintre qui allait à Rome. Nous croyions avoir fait une riche capture en nous emparant d’une cassette fermée qu’il gardait auprès de lui. Quand nous l’ouvrîmes, nous n’y trouvâmes que des vessies de couleurs et des pinceaux de poil.

FILIPPO. Qu’est-ce que cela, des pinceaux ?

BUONAVITA. C’est ce qui sert à mettre des couleurs sur un dessin.

FILIPPO. Oh ! donnez-moi cette cassette, et je vous aimerai bien.

BUONAVITA. Je vais la chercher.

FILIPPO, avec joie. Stella, je vais avoir des couleurs !…

STELLA. Je ne comprends pas ton bonheur, Filippo ; moi, je ne serai contente qu’en revoyant nos parents.

BUONAVITA, revenant avec la cassette. Voilà, mon ami. Stella, si vous ne voulez pas être grondée par Brutaccio, allez vous occuper du dîner ; notre chef ne tardera pas à revenir de sa tournée.

(Stella entre dans la caverne.)

FILIPPO, ouvrant la cassette. Oh ! Buonavita, que ces