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à ces orages qui ébranlent, déracinent et portent la mort dans la nature. Le malheureux savetier était si pâle tout en aidant à son fils, qu’il semblait frappé d’un mal subit.

» Ne plus revenir ici chaque soir pour souper avec vous et pour coucher auprès de vous, ce sera bien triste, disait l’enfant, dont les pleurs continuaient à couler.

— Il le faut bien, répliquait le père essayant de cacher sa propre défaillance, tu me donneras un bonsoir à travers le mur en me jetant par-dessus une branche d’arbre ou un petit caillou. »

L’enfant sourit de cette idée et promit de n’y pas manquer.

Ils se raffermirent le mieux qu’ils purent, et vers la nuit ils gagnèrent la porte du collége ; elle se referma vite sur le petit Joachim : il avait fallu brusquer les adieux.

C’était l’heure de la récréation du soir ; l’enfant fut bientôt distrait de sa tristesse par l’empressement de ses nouveaux compagnons, qui tous lui firent bon accueil. Il n’en fut pas de même du père, qui resta seul après cette séparation. En sortant du collége, il n’eut pas le courage de regagner tout de suite sa pauvre échoppe ; il erra au pied des murailles qui renfermaient désormais son fils bien-aimé, et quoique la nuit fût très-froide, il en fit plusieurs fois le tour. Il lui semblait que l’enfant allait lui apparaître quelque part à travers ces pierres. Il ne se décida à rentrer que lorsque le tintement de la cloche du collége annonça l’heure du dortoir ; il alluma sa petite lampe de fer, mais il n’eut pas le courage de faire du feu pour préparer son souper et pour se réchauffer ;