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beauté de l’art grec, dont l’image l’enivrait avant même d’en avoir pu admirer les chefs-d’œuvre ; il ne rêvait qu’antiquités grecques et romaines, et souvent il entraînait ses compagnons d’études dans un champ voisin de Steindall, où l’on avait découvert des lampes et des urnes helléniques ou étrusques, et là, sous la direction du jeune Winckelmann, les écoliers faisaient de petites fouilles. Un jour Winckelmann rapporta en triomphateur deux urnes antiques qui sont encore à la Bibliothèque de Sechausen.

À l’âge de seize ans, son bienfaiteur Toppert permit à Winckelmann d’aller à Berlin commencer ce que l’on appelle en allemand des cours académiques. Bientôt le recteur du collége de Baaken lui confia la surveillance de ses enfants et lui offrit en retour chez lui le logement et la table. Winckelmann put alors économiser de petites sommes qu’il envoyait à son père qui languissait infirme dans l’hospice de Steindall. Au bout d’un an, Toppert le rappela dans cette ville et lui fit donner la place de chef des choristes. Le soir il se joignait, selon l’usage de l’Allemagne, aux pauvres écoliers qui chantaient dans les rues des cantiques et des motets. Il parvenait ainsi à grossir les petites sommes qu’il portait régulièrement à son père.

Le moment de choisir enfin une carrière arriva pour lui ; on lui conseilla de se faire ministre évangélique, mais cette seule pensée l’épouvantait. Vivre dans la froide Allemagne en pasteur protestant lui semblait à jamais emprisonner sa jeunesse et son âme. Une image radieuse, celle de la Grèce antique, remplissait toute son imagination ; le soleil et l’art de cette terre prédestinée brillaient devant lui : c’était comme une tentation fixe qui ne lui laissait plus de repos. À défaut de la Grèce, ne pourrait-il visiter l’Italie, qui avait hérité d’une partie des merveilles d’Athènes ? Ce rêve s’empara de son esprit ; pour le réaliser il aurait tout sacrifié. À force de vivre en pensée dans l’antiquité, il se passionna