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Le directeur écrivit au père l’équipée du fils ; le père, le jugeant incorrigible et pervers, répondit au directeur qu’il voyait bien que son fils ne ferait jamais qu’un mauvais ministre de Dieu, mais que, pour le punir de sa rébellion à ses volontés, il l’humilierait en en faisant un ouvrier ; et il donnait des ordres pour qu’on le mît à l’instant même en apprentissage chez un cordonnier.

Le petit Charles était d’une nature douce et faible ; il ne résista pas et trouva même, au début, une sorte de satisfaction dans la demi-liberté que lui laissait sa nouvelle et étrange profession. Avant sa journée de travail manuel, il pouvait parcourir les champs, et le dimanche il s’y égarait en liberté. Le soir et durant la nuit, il classait les plantes et les fleurs qu’il avait récoltées et écrivait des dissertations sur chacune d’elles. Mais insensiblement ce double et incessant travail de l’esprit et du corps altéra sa santé. Puis, passer la journée avec des compagnons ignorants et grossiers lui était une rude épreuve. On le brusquait quand il restait silencieux ; on lui reprochait son orgueil, et parfois même on lui cherchait violemment querelle. Cette lutte, qu’il subissait contre la destinée, finit par le terrasser ; il tomba subitement malade, et le maître cordonnier, qui l’aimait comme un de ses meilleurs ouvriers, envoya chercher le plus habile médecin de la contrée.

C’était un très-savant homme qui se nommait Rothman ;