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épaisse s’élève de chaque toit de chaume et annonce que chaque famille se chauffe autour du foyer.

Par une soirée d’hiver de 1719, la cheminée du presbytère du village de Roeshult, pauvre habitation qui ne se distinguait guère des chaumières qui l’environnaient, jetait dans l’air compacte et glacé une colonne de noire fumée ; dans l’intérieur brûlait un grand feu de tourbe. Le pasteur et sa famille, qui se composait : de la femme du pasteur, excellente ménagère, de deux petites filles de sept à huit ans, et d’un garçon qui pouvait en avoir douze, étaient rangés autour d’une table pour la veillée ; sur cette table brûlait une lampe de fer basse, grossière et à trois becs ; au pied de la lampe étaient amoncelées de grosses pelotes de laine brune avec laquelle la mère tricotait des bas ; les aiguilles d’osier claquaient dans ses doigts, les deux petites filles luttaient d’émulation pour imiter la besogne de leur mère et y parvenaient assez bien ; tandis que le pasteur, accoudé sur la table et la tête baissée sur une grande Bible, en lisait de temps en temps quelques récits qu’il commentait.

[Illustration : Presbytère du village de Roeshult.]

Toute l’attention du petit garçon, dont les cheveux blonds obstruaient le front et les yeux, paraissait absorbée par un cahier de papier blanc sur lequel il fixait des herbes et des fleurs. Ses petites sœurs le regardaient parfois à la dérobée, mais sans l’interrompre de son travail ; quant à la mère, elle lui jetait de temps en temps un bon regard, accompagné d’un sourire, tout en épiant son mari, le ministre, qui continuait sa docte et pieuse lecture sans lever les yeux sur son auditoire.

Mais tout à coup celui-ci secoua sa grosse tête à la