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L’organiste s’inclina profondément et se rendit à son poste.

L’église était encore pleine de monde, l’évêque retourna à l’autel entouré de tout son clergé ; on comprit que la paix venait d’être conclue, et chacun ne songea plus qu’à la prière.

L’office recommença.

Insensiblement une musique suave, et pour ainsi dire persuasive, se répandit comme un encens, bientôt la majesté de ces accords si doux s’éleva et s’accrut ; toutes les terribles grandeurs de la Bible, toutes les tristesses et toutes les mansuétudes de l’Évangile se répandirent dans des harmonies successives. Les assistants pleuraient d’attendrissement. La bonté de l’évêque avait touché le jeune organiste et son âme était en ce moment inspirée par tous les sentiments qui l’agitaient ; il improvisait une musique surhumaine, car l’art double nos sensations et les transporte dans l’incréé. C’est ce qui fait l’idéal des grandes œuvres des poëtes et des musiciens.

Sans la sainteté du lieu, la foule, tout à l’heure irritée, aurait applaudi avec frénésie cette musique si belle. On voulut du moins complimenter l’organiste ; on l’attendit longtemps sur la place, mais se dérobant à cette ovation, il était sorti par une petite porte de l’église qui s’ouvrait sur une rue.

Seul enfin, il s’élança dans la campagne, courant au hasard et respirant l’air à pleine poitrine ; il s’arrêta sur une hauteur qui dominait la ville, et s’écria plein de joie : » Libre ! libre ! maître de moi-même ! »

Bientôt il rentra pour faire visite à l’évêque, qui lui