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va glorifier le souvenir de la princesse Élisabeth. Vous avez vu, poursuivit l’aimable fille du gardien, ces jolies tentes qui s’élèvent sur la pelouse derrière la grande tour ; dans huit jours, toutes les ladies et tous les lords de l’île se réuniront là autour de la reine ; le but de la fête est une vente d’objets d’art et d’ouvrages charmants auxquels les belles mains des plus grandes dames ont travaillé ; sous ces tentes s’abriteront les ladies transformées en marchandes, et vous pensez si l’or tombera dans leurs mains ! Avec cet or, on fera un monument digne d’elle à la princesse dont le doux fantôme est la poésie de notre île. Il y a deux ans, la vieille église de Newport fut abattue, et le prince Albert posa la première pierre d’un nouveau temple ; c’est là que le cercueil de la princesse Élisabeth a été porté ; c’est là que s’élèvera son monument ; la reine a promis la statue qui doit le couronner.

» Cette statue ! je l’ai vue, lui dis-je ; c’est bien la jeune princesse lorsqu’on la trouva morte, étendue blanche et pudique dans les plis de son vêtement. La tête, d’une beauté idéale, repose sur la Bible ouverte ; les cheveux ombragent le cou, le sein et les bras : c’est une figure chaste et divine qui convient à un tombeau ; l’âme y plane sur un corps transfiguré. Cette figure est l’œuvre de Marochetti. »

Nous restâmes encore, la jeune gardienne et moi, quelques instants en silence dans cette petite chambre où s’était accomplie la sereine agonie ; la nuit était venue et me rappela la nécessité du départ. Je n’osai, en la quittant, offrir de l’argent à la charmante fille si poétique et si intelligente ; j’avais dans ma voiture un beau