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s’étendaient les plaines et les collines couvertes de cultures abondantes. Tout l’intérieur de la tour, vide des constructions primitives, est devenu comme un puits de verdure où s’enlacent les lierres et les sureaux. Des lézards sautaient du mur en ruine où j’étais adossée et disparaissaient dans cet abîme dont ils agitaient un moment la surface : c’était le seul bruit qui parvenait jusqu’à moi ; à cette hauteur, la nature paraissait endormie sous l’accablante chaleur de ce jour d’août.

Il me semblait voir errer, sur les remparts de la vieille citadelle que je dominais, l’ombre de Charles Ier, de ce roi chevaleresque et mélancolique, passionné et lettré comme Marie Stuart ! Il aimait les arts en profond connaisseur, il savait goûter Raphaël dont il recueillit les précieux cartons ; il fit éclater le génie de Van Dyck et décida de sa fortune.

Sa famille était dispersée, la reine (Henriette, fille de Henri IV) avait passé en Hollande (avant la déchéance du roi) avec la princesse royale qui épousa le prince d’Orange ; la reine était revenue en Angleterre ramener des secours pour la royauté ; mais elle fut forcée de se réfugier bientôt en France, où la princesse Henriette (qu’immortalisa Bossuet), le prince de Galles (qui fut plus tard Charles III), et le duc d’York (qui devint Jacques II), la rejoignirent. — Deux autres enfants, la petite princesse Élisabeth et son plus jeune frère le duc de Glocester, n’avaient pu quitter l’Angleterre pendant la captivité de leur père ; ils furent confiés par le Parlement à la comtesse de Leicester ; elle eut pour eux des soins de mère. Il est rare, malgré la guerre et les passions politiques qui déchaînent les hommes, qu’une femme se