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le jour où je suis allé en haute mer en compagnie des deux petits mousses de Rotterdam.

— C’est bien cela, mon enfant, reprit Cornille Bart, et puisque tu te souviens de ce portrait du Renard de la mer, c’est comme si tu te souvenais de l’avoir vu vivant. Donc le Renard de la mer et ton grand-père étaient comme frères. Un soir d’hiver, nous étions réunis ici dans cette même chambre, bien chaudement près d’un bon feu, fumant du tabac de Hollande et buvant de l’ale d’Angleterre. Un corsaire, ami de mon père, nous racontait ses courses lointaines et ses combats ; je l’écoutais comme tu m’écoutes ; tout à coup la porte s’ouvre, et le Renard de mer apparaît, enveloppé d’un long manteau goudronné, tout ruisselant d’eau ; il pleuvait à torrents et la mer était grosse. Sous son manteau, le Renard était armé en guerre.

» Antoine, dit-il à mon père, j’ai besoin de toi, de ton fils, de ton équipage et de ton brigantin.

» — Quand cela ? dit mon père.

» — À l’heure même, répondit le Renard, et pour aller en haute mer.

» — Nous allons, mon fils et moi, nous armer pour te suivre, » dit simplement mon père. Ce fut bientôt fait. Nous sortîmes tous les trois et nous nous rendîmes au port. La nuit était sombre. Onze heures sonnaient au carillon. Nous trouvâmes notre brigantin, l’Arondelle-de-Mer, avec tout son équipage à bord. C’était le vouloir de mon père ; il fallait que l’on fût prêt au départ à toute heure.

» Le bosseman leva l’ancre.

» Quand nous fûmes en pleine mer, le Renard fit apporter