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tyrannique, tragi-comédie de Scudéry. Elle songea aux demoiselles Saintot, à leur petite amie Jaqueline et à son frère Pascal ; mais Gilberte, la sœur aînée, qui veillait sur les enfants dont le père était proscrit, répondit fièrement au gentilhomme qui lui fut envoyé en cette occasion par la duchesse d’Aiguillon : » Monsieur le cardinal ne nous donne pas assez de plaisir pour que nous pensions à lui en faire. » La duchesse insista et fit même entendre que le rappel de leur père devait en dépendre. Les amis de la famille décidèrent alors que Jaqueline accepterait le rôle qu’on lui proposait. Le célèbre acteur Montdory, qui était de Clermont et qui connaissait la famille Pascal, donna des leçons à Jaqueline et se chargea de monter la pièce. Le jour de la représentation arriva. Jaqueline, qui avait à peine douze ans, mit dans son jeu une gentillesse qui charma tous les spectateurs, et surtout Richelieu. Le cardinal ne cessa de l’applaudir. Elle profita de son succès pour obtenir la grâce de son père. Écoutons-la faire le récit de cette soirée dans une lettre adressée à son père et restée jusqu’ici inédite. Nous la donnons d’après le manuscrit de la Bibliothèque impériale.

» Monsieur mon père,

» Il y a longtemps que je vous ai promis de ne point vous écrire si je ne vous envoyais des vers, et, n’ayant pas eu le loisir d’en faire (à cause de cette comédie dont je vous ai parlé), je ne vous ai point écrit il y a longtemps. À présent que j’en ai fait, je vous écris pour vous les envoyer et pour vous faire le récit de l’affaire qui se passa hier à l’hôtel de Richelieu, où nous représentâmes